Depuis longtemps, ExxonMobil, BP et Shell ont nié le changement climatique dont ils étaient pourtant certains de la gravité. Qu’à coups de milliards de dollars, les géants pétroliers américain, britannique et anglo-néerlandais ont fait circuler des fausses informations et financé des climatosceptiques. Qu’ils ont entravé de manière méthodique toute politique de réduction des émissions de gaz à effet de serre.
Aujourd'hui, tous les regards se tournent vers la France. De surprenantes révélations ont vu le jour à propos de Total et Elf. Si des chercheurs affirment que les deux géants du pétrole savaient dès 1971 que leur activité aurait un impact néfaste sur l'environnement, il se pourrait qu'ils aient également tenté d'étouffer l'information.
La pollution des industries pétrolières est connue comme l'une des plus impactantes au monde. Dans un magazine interne de Total, plusieurs passages laissent penser que la célèbre entreprise était informée dès le début des années 1970 des effets néfastes de leurs activités sur la planète. "Il n'est pas impossible selon certains, d'envisager une fonte au moins partielle des calottes glaciaires des pôles, dont résulterait à coup sûr une montrée sensible du niveau marin. Ses conséquences catastrophiques sont faciles à imaginer", avertissait un expert en climatologie dans le magazine.
Cependant, Total a démenti ces accusations dans un communiqué de presse.
Dans un document confidentiel daté de 1993, on peut lire des consignes données à la direction pour répondre aux interrogations sur l'impact climatique : "Montrer que, contrairement à une idée à la mode, l'écologie est plus destructrice que créatrice d'emplois", peut-on y lire en plus d'autres conseils sur les éléments de langage à adopter.
De nombreux chercheurs accusent, donc, Total d'avoir minimisé, voire nié sciemment, l'impact de son activité sur le réchauffement climatique.
Il semble difficile de croire que, dans une activité qui génère de plus de 33% des émissions de gaz à effet de serre, l'on puisse penser que l'environnement s'en sort indemne.
La réalité tendrait plutot vers le contraire. En effet, cet impact néfaste, le groupe Total le mesure depuis fort longtemps. Dans un rapport interne révélé par l'émission "Complément d'enquête", dès 1971, des membres de Total ont produit des écrits attestant de la pleine conscience de l'effet délétère de l'activité du groupe.
Greenpeace dénonce le greenwashing de Total
Chercheur au CNRS, Christophe Bonneuil a exhumé ces archives de Total, jusqu'alors tenues secrètes. Pour lui aussi, il ne fait aucun doute que le groupe aurait consciemment minimisé les conséquences de ses activités pétrolières. "Il y a vraiment un décalage entre ce qui a été dit en interne et ce que le grand public savait. On est dans un moment où la question environnementale émerge dans l'espace public et dans un moment où l'entreprise Total doit développer du savoir et des stratégies", explique l'historien. Pour Greenpeace, Total n'a pas changé de stratégie, juste reverdit son image. Le groupe continue de réaliser 90% de ses investissements dans les énérgies fossiles.
Publié le 21/10/2021 16:09
Commentaires