Le nombre de personnes en situation d’insécurité alimentaire aiguë en Afrique de l’Ouest et du Centre a maintenant atteint un niveau record de 28 millions de personnes et les tendances indiquent une nouvelle détérioration si le soutien pour endiguer la propagation de la faim n’est pas intensifié, ont averti aujourd’hui deux agences des Nations Unies - l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) et le Programme alimentaire mondial (PAM).
Au Sahel et en Afrique de l’Ouest, 26 millions de personnes n’ont actuellement pas assez de nourriture pendant la saison des récoltes en cours (octobre-décembre 2021) alors que la fin de la période creuse va arriver à son terme, selon un rapport du Cadre Harmonisé (CH) sur la sécurité alimentaire qui vient d’être publié. En République centrafricaine, 2 millions de personnes supplémentaires sont également en situation d’insécurité alimentaire aiguë au cours de la même période, selon une analyse distincte de la Classification intégrée de la phase de sécurité alimentaire (IPC).
Il s’agit du plus grand nombre de personnes confrontées à des niveaux d’insécurité alimentaire aiguë élevée en Afrique de l’Ouest et du Centre enregistrés depuis 2014, avec des niveaux de malnutrition aiguë dépassant le seuil d’urgence de 15% dans certaines parties du Burkina Faso, du Tchad, du Mali, de la Mauritanie et du Niger.
La montée de la faim est due à un conflit prolongé, à des perturbations économiques liées à la pandémie de COVID-19, à des bouleversements climatiques extrêmes, à un accès limité aux services sociaux de base et à la flambée des prix des denrées alimentaires - qui ont atteint ce mois-ci leur plus haut niveau en dix ans. La mauvaise saison des pluies de 2021 a également affecté la production agricole et de pâturages dans certaines régions.
La FAO et le PAM exhortent les dirigeants régionaux et leurs partenaires à se mobiliser pour répondre aux besoins immédiats et s’attaquer aux principaux facteurs d’insécurité alimentaire dans la région.
Les rapports du CH et de l’IPC avertissent que sans une action immédiate, efficace et coordonnée, le nombre de personnes sans la garantie d’un prochain repas atteindra 35,7 millions au Sahel et en Afrique de l’Ouest et 2,3 en RCA de juin à août 2022 - une augmentation de 23% par rapport à la période de soudure de cette année (juin à août 2021).
Période de soudure : La soudure désigne, pour les populations vivant de l'agriculture vivrière, la période de l'année précédant les premières récoltes et durant laquelle les produits des récoltes précédentes viennent à manquer. Il y a alors souvent pénurie et une flambée des prix parfois accentuée par la spéculation.
Ces projections incluent 2,5 millions de personnes en situation d’urgence (IPC/CH Phase 4) et 13 550 hommes, femmes et enfants dans des conditions catastrophiques ou semblables à la famine (IPC/CH Phase 5) pendant la période de soudure 2022, lorsque la nourriture est la plus rare.
« Les indicateurs de sécurité alimentaire pointent tous dans la mauvaise direction dans cette région, et nous constatons que la faim est à son plus haut niveau depuis près de huit ans. Nous sommes confrontés à des perspectives de financement inquiétantes, les besoins dépassant les fonds disponibles. C’est le moment d’intensifier notre aide, et non de réduire les rations », a déclaré Chris Nikoi, Directeur régional du PAM pour l’Afrique de l’Ouest.
« Les donateurs doivent redoubler d’efforts avant que la période de soudure ne s’installe et ne voit les besoins exploser. Nous devons agir maintenant. Nous pouvons empêcher une augmentation des taux de malnutrition. Ce n’est pas une fatalité. Et en même temps, nous devons aider à renforcer la résilience des communautés grâce à une réponse proactive, dirigée par le gouvernement et appartenant à la communauté, à l’insécurité alimentaire et à la malnutrition », a ajouté Nikoi.
Malgré la levée des restrictions liées à la COVID-19, l’impact économique de la pandémie se poursuit dans la région avec un espace budgétaire limité, une dette publique accrue, une inflation galopante et une hausse des prix des denrées alimentaires, qui ont entraîné une augmentation de 3% de l’extrême pauvreté en 2021.
« Compte tenu de la situation, nous appelons à augmenter les investissements pour assurer la production hors saison et préserver les moyens de subsistance des éleveurs en vue de la prochaine période de soudure », a déclaré Gouantoueu Robert Guei, Coordonnateur sous-régional de la FAO pour l’Afrique de l’Ouest.
« La disponibilité réduite des pâturages et la mobilité limitée due à l’insécurité poseront d’énormes défis aux éleveurs au cours des prochains mois. Dans le même temps, dès le début de 2022, nous appelons à des investissements adéquats dans la préparation de la prochaine saison agricole. Investir dans les moyens de subsistance des populations est essentiel pour empêcher l’insécurité alimentaire de s’aggraver », a ajouté M. Guei.
Assurer un accès immédiat à la nourriture, une production alimentaire soutenue et préserver les systèmes alimentaires, ouvrant la voie au relèvement, en particulier dans les zones touchées par le conflit telles que la région du Liptako-Gourma et le bassin du lac Tchad, sont les réponses humanitaires les plus efficaces et rentables selon la FAO et le PAM.
Publié le 11/12/2021 10:21
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