Récemment, l’un de nos débats portait sur la question de savoir si croissance et écologie pouvaient aller de pair. Il semblerait que l’actualité nous donne un début de réponse. En effet, les émissions de CO² engendrées par la production d’énergie ont baissé en 2020 mais, malheureusement, le répit sera de courte durée. Pour quelle raison ? La reprise de la croissance.
La baisse de la demande mondiale liée à la pandémie de Covid 19 a permis de faire chuter de manière significative les émissions de CO² de 5,8 % en 2020. Toutefois, le retour de bâton pourrait être violent si l’on en juge au coup de semonce lancé par l’Agence Internationale de l’Energie (AIE). Fatih Birol, directeur exécutif de l’agence, a déclaré « C'est un avertissement terrible. La reprise économique après la crise du Covid-19 est actuellement tout sauf durable pour notre climat ». Et de s’alarmer : « Cela montre que la reprise économique mondiale sera particulièrement carbonée et cela met en danger les objectifs mondiaux de réduction des émissions ».
L’AIE prévoit pour 2021 une progression record de 4,5 % des émissions de CO² essentiellement due à la forte augmentation des besoins en énergie. Les combustibles fossiles sont responsables mais, une fois de plus, c’est le charbon qui est montré du doigt. A lui seul, il va représenter la grande majorité de la hausse dépassant ainsi le niveau de 2019 et quasiment celui de 2014.
Au total, les émissions de CO² liée à l’énergie auront retrouvé, en fin d'année 2021, les niveaux d’avant pandémie.
Sans surprise, c’est l’Asie et notamment la Chine qui arrivent en tête. Rappelons que ce pays possède un des plus grands parcs de centrales à charbon du monde et en raison du fort rebond de l’économie chinoise, elles tournent à nouveau à plein régime pour fournir l’électricité nécessaire. Autre énergie fossile, le gaz naturel arrive en seconde position, bien placé en Asie mais également au Moyen Orient et en Russie. Son utilisation sera supérieure à 2019, prévoit l’Agence.
L’Asie n’est, certes, pas le seul continent à avoir recours massivement au charbon. On le retrouve aussi en Europe et aux Etats-Unis. Cependant, l’AIE indique que son niveau « devrait rester bien en deçà des niveaux d'avant la crise ».
Quant au pétrole, même en progression, il ne renouera pas avec les records d’avant crise sanitaire en raison de nombreux pans de l’économie qui ne sont toujours pas repartis comme par exemple le secteur du transport.
Cependant, il y a une note positive à retirer de ces nouvelles inquiétantes. C’est la part notable qu’occupent les énergies renouvelables dans la production d’électricité. Le solaire et l’éolien progressent fortement avec respectivement 18% et 17% de hausse par rapport à 2020. Et c’est encore la Chine qui se distingue en représentant la moitie de la production. Ce pays est très en avance en la matière comme le concédait hier Antony Blinken, secrétaire d’Etat américain : « La Chine est le plus grand producteur et exportateur de panneaux solaires et de turbines éoliennes ». Selon l’IAE : « La hausse de la consommation d'électricité en 2021 est près de cinq fois supérieure à la baisse de 2020 . Et la production d'électricité renouvelable devrait croître de 8 %, pour fournir quelque 30 % de l'électricité mondiale (hydroélectricité incluse), contre moins de 27 % en 2019. »
Alors que s’amorce la saison des sommets sur le climat, c’est une forte pression qui repose sur les épaules de nos décideurs, à la hauteur de l’urgence de la situation. Fatih Birol est la pour le rappeler avec fermeté : «c’ est un moment critique pour s'engager à des actions claires et immédiates avant la COP26 de Glasgow. […] Sinon, il est probable que nous affrontions une situation pire encore en 2022 ».
Mais terminons cet article comme il a débuté. On doit pouvoir dire à présent que croissance et écologie, en l’état actuel de nos modes de production, ne font pas vraiment bon ménage. La prochaine question qui nous vient alors est : laquelle des deux allons-nous sacrifier ?
Publié le 21/04/2021 12:05
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