Fidèle à ses promesses de campagne, le Président américain, Joe Biden, continue le déploiement de sa politique environnementale.
Cette fois ci, le secrétaire d’Etat, Anthony Blinken , se rendra, la semaine prochaine, au Groenland. Lors de ce déplacement, il est prévu qu’il assiste à une réunion du Conseil de l’Arctique en Islande et qu’il rencontre le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, sous fond de tensions diplomatiques. Le changement climatique sera au centre des discussions. En effet, la fonte des glaciers en Arctique soulève des inquiétudes grandissantes et nécessite les efforts de tous pour la combattre. Anthony Blinken demandera donc une coopération renforcée. C’est ce qu’a souligné le porte-parole de la diplomatie américaine, Ned Price, dans un communiqué : l’urgence d’un « partenariat très fort entre les Etats-Unis et le Groenland et de notre engagement à accroître la coopération dans l'Arctique». A Copenhague, l’émissaire américain s'entretiendra avec la première ministre danoise, Mette Frederiksen, ainsi qu'avec d'autres dirigeants et des entrepreneurs danois sur les moyens de «combattre la crise climatique», notamment à travers le développement de nouvelles technologies
Il évoquera également le nouveau découpage géopolitique et géo-économique que pourrait dessiner la fonte des glaciers dans les années à venir. En effet, la fonte des glaces dans l’Arctique ouvre de nouvelles routes maritimes reliant l’Asie à l’Europe plus rapidement. Ces opportunités économiques et stratégiques n’ont pas échappé à la Chine et la Russie qui se montrent toujours plus entreprenants dans la zone. Anthony Blinken avait, d’ailleurs, accusé, le mois dernier, la Russie d’ «exploiter ce changement pour tenter d'exercer un contrôle sur ce nouvel espace».
Avec cette visite, l’Administration Biden entend marquer une nouvelle fois sa différence avec son prédécesseur et prendre le contrepied de sa politique. On se souvient du dévolu qu’avait jeté Donald Trump sur l’Arctique, proposant même de l’acheter. En 2019, Mike Pompéo, alors Secrétaire d’Etat et ancien directeur de la CIA, avait déclaré : “S’agissant des possibilités et des richesses, l’Arctique occupe une place de choix. Il abrite 13 % des réserves pétrolières inexploitées de la planète, 30 % de ses réserves gazières, de l’uranium, des terres rares, de l’or, des diamants en abondance, et des millions de kilomètres carrés de ressources inexplorées, y compris dans le domaine de la pêche". Et de penser que le passage par l’Arctique “pourrait réduire d’environ vingt jours le temps de trajet entre l’Asie et l’Occident” et à terme représenter “les canaux de Suez et de Panama du XXIe siècle.”
Ces matières premières sont des enjeux colossaux et la fonte des glace offre des perspectives commerciales immenses. En 2019, Vladimir Poutine avait fixé des objectifs élevés avec 80 millions de tonnes transportées par an d'ici à 2025 (47 pour le gaz naturel, 23 pour le charbon, 5 pour le pétrole, 5 pour les produits industriels lourds). Lors du dernier Forum sur l'Arctique à Saint-Pétersbourg, il avait même déclaré : « Il y a dix ans, ce chiffre semblait inaccessible. Il s'agit maintenant d'une tâche réaliste, calculée et substantielle. À la fin de l'an passé, le volume a déjà atteint 20 millions de tonnes. Trois fois plus que le record soviétique en 1987 ».
Route du nord pour les uns ou nouvelle route de la soie pour les autres, tous voient dans le réchauffement climatique la chance d’exploiter encore davantage les ressources naturelles.
La Chine et les Européens ne sont pas non plus en reste. Parmi les nombreux projets, les Russes ont déjà réussi, dans la péninsule voisine, un énorme chantier : la méga-usine de gaz naturel liquéfié à Yamal, l'un des coeurs de cette nouvelle route. Lancée en décembre 2017, elle a été construite par le groupe russe Novatek avec le français Total et des… financements chinois.
Mais les velléités de tous ne sont pas sans danger. En effet, les intérêts financiers, économiques et politiques sont si élevés que cette région du monde pourrait se transformer facilement en poudrière et être source de conflits entre grandes puissances.
C’est la raison pour laquelle la visite d’Anthony Blinken est également une démarche de pacification. Le secrétaire promouvra les initiatives visant à faire de l’Arctique une région de paix, exempte de conflits, où les membres du Conseil de l’Arctique collaborent sur des priorités communes afin de protéger le bien-être des communautés arctiques et de faire face à la menace ainsi qu’aux impacts toujours croissants de la crise climatique.
Publié le 15/05/2021 12:20
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